Qu’à l’aube de la Révolution française, la noblesse et ses privilèges aient été l’objet d’une violente contestation est un fait bien connu. Qu’une importante fraction du second ordre, en l’occurrence la noblesse militaire de province, ait été à l’avant-garde de ce combat d’opinion l’est beaucoup moins. En centrant l’attention et l’analyse sur la rhétorique anti-nobiliaire de la noblesse militaire de province, cet article révèle que, dans la première année de la Révolution, la signification de mots aussi cruciaux qu’égalité ou mérite était rien moins qu’uniforme et consensuelle. En restituant l’histoire de ce programme révolutionnaire alternatif et oublié – un parmi tous ceux qui existèrent en 1789-1790 –, cette contribution suggère à quel point il peut être utile de penser des révolutions plutôt que la Révolution, lorsqu’il est question des bouleversements de cette année décisive.