Le Roman de Silence, récit en vers composé au XIIIe siècle, prétend délivrer des leçons normatives sur le monde comme il va ou comme il devrait aller, tout en proposant pour héroïne principale une jeune fille, Silence, qui est élevée et considérée par chacun (y compris par elle-même) comme un garçon. L’article s’interroge sur l’articulation problématique entre la visée didactique affichée de ce roman et la fiction qu’il développe, laquelle met en crise toutes les lignes de partage qui organisent ordinairement la psychè, la société et le langage : ce roman expérimental accroît les possibilités de la fiction et de la langue littéraire au lieu de les réduire, comme son statut revendiqué de récit exemplaire pourrait, superficiellement, le laisser croire.