
Histoire, Economie et Société (4/2025)
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Cet article contribue à l’analyse de la place du corporatisme dans les politiques économiques dirigistes de l’après Seconde Guerre mondiale en France. Nous nous concentrons sur le Comité National des Prix (CNP), au sein duquel syndicats salariaux et patronaux débattent des grandes décisions en matière de contrôle des prix. Nous montrons que, en dépit des apparences, cette institution et, partant, la politique des prix, ne peuvent pas être considérées comme relevant d’une forme de corporatisme. Deux éléments viennent soutenir cette thèse. Premièrement, les décisions de blocage des prix, particulièrement fréquentes dans les années 1950, demeurent systématiquement adoptées en dépit de l’opposition conjointe des deux principaux syndicats : la CGT et le CNPF. Deuxièmement, le « tournant contractuel » de la politique des prix dans les années 1960, inspiré de la pensée corporatiste et des réflexions sur la « politique des revenus », intervient en réalité en dépit d’une opposition structurelle entre les syndicats salariaux et patronaux. L’ambition d’un « tournant corporatiste » de la planification dans les années 1960 est ainsi mise en échec par la persistance d’importants antagonismes syndicaux, autant que par la verticalité des prises de décisions en matière de prix.
This article contributes to the analysis of corporatism in the dirigiste economic policies of post- World War II France. We focus on the ‘Comité National des Prix’ (National Pricing Committee – CNP), where labor and employer unions debated key price control decisions. We demonstrate that, despite appearances, this institution— and by extension, price control policy—cannot be classified as a form of corporatism. Two key elements support this thesis. First, decisions to freeze prices, which were particularly frequent in the 1950s, were systematically adopted despite the joint opposition of the two main unions : the CGT and the CNPF. Second, the « contractual turn » in price policy during the 1960s, inspired by corporatist thought and discussions on « income policy » occurred despite a structural opposition between labor and employer unions. The ambition for a « corporatist turn » in planning during the 1960s was thus thwarted both by the persistence of significant union antagonisms and the vertical nature of price decision-making processes.

