
ANNALES HISTORIQUES DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE Nº 421 (3/2025)
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La vague des « repas fraternels », banquets organisés spontanément par les Parisiens en messidor an II, a pu agir comme un révélateur des relations régissant le voisinage dans la capitale. Après avoir présenté les grandes caractéristiques des banquets, cet article se penche sur la section des Amis de la Patrie, où se sont produits plusieurs incidents entre les habitants et des agents des forces de l’ordre. On fait l’hypothèse que ces incidents reflètent une morphologie sociale particulière à cet espace, que l’on se propose d’étudier. Les interventions de policiers devenus des outsiders par rapport au local, pour empêcher les banquets, ont entraîné de vives réactions et des violences à leur égard. Celles-ci s’expliquent par le contexte de la fête, mais aussi la densité particulière des relations sociales au sein des classes populaires dans l’espace de cette section, emblématique de l’évolution de certaines portions du vieux centre de Paris à la fin du XVIIIe siècle et accélérées par la Révolution. L’évolution du bâti et des transformations de la structure productive ont convergé pour établir un dense tissu relationnel entre les habitants des rues de la section, fondé aussi sur la proximité physique et sur les pratiques professionnelles quotidiennes. Les incidents lors des repas fraternels de messidor II attestent du maintien, voire du renforcement de formes de cohésion communautaires dans l’espace parisien, malgré les brassages et les institutions nouvelles de la Révolution.
The waves of “fraternal meals,” banquets organized spontaneously by Parisians in messidor Year II, offer revealing insights into the relationships governing neighborhood life in the capital. After presenting the main characteristics of these banquets, the author focuses on the Amis de la Patrie section, where several incidents occurred between residents and law enforcement officers. These incidents reflected a social morphology specific to this part of the city. The intervention of police officers, themselves outsiders to this local community, in their efforts to prevent the banquets from taking place provoked strong reactions and violence directed against them. These reactions can be explained by the festive ambience, and also by the especially dense social relations within the working classes in this section of the city − social relations emblematic of the evolution of certain parts of the old center of Paris at the end of the eighteenth century, and accelerated by the Revolution. The evolution of the urban environment and the changes in the productive structure combined to establish a dense network of relationships between the inhabitants of the streets in this section, rooted in physical proximity and on daily professional practices. The incidents during the fraternal meals of messidor II attest to the maintenance, indeed the strengthening of forms of community cohesion in Paris, despite the social mixing and new institutions introduced by the Revolution.