Revue d'histoire des sciences - Tome 64 (2/2011)
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Si les maladies des animaux font l’objet de très nombreuses représentations – descriptions, comparaisons, hypothèses – depuis l’Antiquité, c’est au XVIIIe siècle que s’affirme une médecine vétérinaire à part entière. Sous l’autorité de quelques pionniers, tel Claude Bourgelat, s’édifie une science des pathologies animales, particulièrement celles du cheval, et s’institutionnalise un enseignement, avec les premières écoles vétérinaires. La médecine vétérinaire partage avec l’ensemble de la pensée médicale de l’époque, avec, plus encore, l’esprit des arts et des sciences de la seconde moitié du XVIIIe siècle, le désir de développer un ensemble de pratiques, de savoir-faire contribuant à reléguer la peur, l’imagination, l’exagération dans une histoire révolue : l’animal, objet de connaissance et de maîtrise, ne devrait plus faire peur à l’homme. L’émergence d’une médecine destinée aux animaux contribue-t-elle à modifier la perception de ces derniers par les hommes ? Mieux soignés, ils tendent à mieux soigner également l’homme, tant du point de vue de la qualité de son alimentation que de la prévention de sa santé. Devenu objet de soins, l’animal, malade comme en bonne santé, ne se voit pas pour autant devenir, aux yeux de ses contemporains humains, un être plus digne de considération qu’il ne l’était auparavant. Il reste fondamentalement inséré dans le circuit de l’utilité : médicale, alimentaire, esthétique, économique.
If the animal diseases have been since ancient times the subject of so many representations – descriptions, comparisons, assumptions –, it was only in the 18th century that a fully-fledged veterinary medicine was established. Under the leadership of a few pioneers, such as Claude Bourgelat, a science of the animal pathologies, with particular emphasis on the horse, was being constructed and its curriculum was being institutionalized within the first veterinary schools. Veterinary medicine shares, with medical philosophy, better still with the general orientation of the arts and sciences of the second half of the 18th century, the aim to yield practical applications, but also to promote know-how and thus remove phobias, imaginations and exaggerations as part of a bygone history : the animal as the subject-matter of knowledge and mastery need no longer cause fear for humankind. Does the emergence of a branch of medicine devoted to animals contribute to modify their perception in the eyes of humans ? Being treated better, animals would be more beneficent to humankind, both in regard to the quality of nourishment and to the preservation of health. Although having become an object of care, the animal, whether ill or healthy, is not turned into a creature more worthy of consideration than it was before. The animal remains confined to the realm of usefulness : medicine, nourishment, beauty and economy.