Revue d'histoire des sciences - Tome 68 (2/2015)
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De nombreux auteurs ont soutenu que l’imprégnation chez les physiciens français des philosophies rationalistes et positivistes a constitué un obstacle dans la réception de la mécanique quantique en France. Sans remettre en question cette idée, cette étude tend à la nuancer. En faisant un tour d’horizon de la réception épistémologique de la mécanique quantique chez les principaux théoriciens français de l’entre-deux-guerres, elle vise à montrer que ceux-ci ont, dans leur ensemble, su aménager des postures vis-à-vis de la physique quantique, qui, à de rares exceptions près, s’accordaient bien avec leurs présupposés philosophiques. La plus importante d’entre elles par le nombre de ses adeptes, une interprétation appelée ici « cryptomécaniste », avait notamment, malgré son ambiguïté intrinsèque, la capacité de concilier une forme de rationalisme causaliste et une posture positiviste.
Many authors have claimed that the prevalence of a rationalist and positivist philosophy among French physicists was an obstacle in the reception of quantum mechanics in France. Without challenging the basic tenet of this thesis, the present study tends to qualify it. An overview of the epistemological reception of quantum mechanics among the main theoretical physicists of the 30s and 40s shows that these theorists negotiated a reading of quantum mechanics that enabled them to maintain their philosophical outlook. In this perspective, what I call a « crypto-mechanist » interpretation of the measurement process, despite its ambiguity, played an important role, making it possible to reconcile a causal rationalism with a positivist posture.