Littérature n° 160 (4/2010)
Numéro épuisé
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Pourquoi les écrivains sont-ils facilement mal à l’aise lorsqu’on leur demande d’intervenir en public ? C’est que l’écriture est à la fois une activité très spécifique, et une activité dont la spécificité professionnelle est peu marquée et défendue socialement. Précisément parce que le jeu littéraire n'a pas de frontières nettes entres experts et profanes, les confrontations entre les écrivains et leur public peuvent pour les premiers constituer des moments de crise. Leurs témoignages outrés ou leurs expressions de colère réagissant au fait que leur « espace propre » est en permanence piétiné, profané, envahi par des logiques extérieures, ne sont que le symptôme de leur condition au sein d’un jeu social à la fois très spécifique et très faiblement institutionnalisé.
Why are writers so easily destabilized when asked to intervene in public ? Writing is both an intensely specific activity, and one whose professional specificity is neither clearly marked nor defended socially. Precisely inasmuch as the literary game has no clear frontiers between the experts and the profane, encounters between writers and their public can turn into moments of crisis for the former. Their exaggerated accounts of the encounters, or their expressions of anger at the way their “sphere of activity” is constantly trampled upon, penetrated, invaded by logics exterior to it are simply the symptoms of their condition within a social activity which is both very specific and weakly institutionalised.