Romantisme n° 164 (2/2014)
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Stendhal a abondamment pratiqué la littérature d’idées sous toutes ses formes (récits de voyage, pamphlets, chroniques journalistiques, « histoires », etc.) mais n’a qualifié d’« essai » que De l’Amour (1822) qui entend définir le sentiment amoureux, en décrire les mécanismes et les actualisations diverses selon les pays et les types de gouvernement. C’est ce texte qu’on analyse ici d’un point de vue générique. On montre que l’essai stendhalien est habité d’une tension entre une pensée et une démarche analytiques qui le tirent du côté du « traité » et un irréductible empirisme qui le dés-ordonne et l’ouvre à une pensée plus vagabonde appelant la collaboration d’un lecteur bénévole. L’organisation énonciative de De l’Amour, tout comme les motifs structurants du voyage ou de la conversation, font de l’essai tout à la fois un discours situé et ouvert, travaillé par le fragmentaire et le multiple.
Stendhal practiced the literature of ideas abundantly and in all its forms (travel writing, pamphlets, chronicles, “histories”, etc.) but did not call anything an “essay” except for De l’Amour (1822) (On love), which purports to define the feeling of being in love, describe its mechanisms and the diversity of its actualisations according to country and type of government. This is the text under study here from the point of view of its genre. We show that the Stendhalian essay is inhabited by a tension between its analytic thought and methodology, which pull it towards the “treatise”, and an irreducible empiricism which dis-orders it and opens it to thinking of a more wandering kind, which calls for the collaboration of a well-meaning reader. The organisation of speech in On love, like the organising motifs of the trip or the conversation, make of the essay a discourse both located and open, worked over by fragmentation and multiplicity.