Le Français aujourd'hui n° 202 (3/2018)
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Pourmesurer l’incidence d’une suppression du sujet d’invention au baccalauréat, il est particulièrement instructif de prendre le temps d’une contextualisation historique sur le temps long des programmes. L’abandon de la rhétorique, au nom d’un idéal de réflexion personnelle, a entrainé un effet paradoxal. Au fil des réformes du lycée et des débats sur l’enseignement littéraire, une inflation des pratiques de commentaire se constate et, davantage encore, une prévalence de la lecture reproduisant des discours d’autorité. L’examen des programmes actuels confirme cette inflexion et permet de distinguer deux cultures de l’écriture selon les niveaux considérés. Le souci d’une didactique de l’écriture favorisant le processus sur le produit et la sollicitation d’une posture d’auteur se perd à partir du cycle 4. L’enjeu, très tôt audible, de préparation des épreuves du baccalauréat trouve seulement dans le sujet d’invention la possibilité de ne pas cantonner le cours de français à une information sur des objets d’études distincts de toute pratique personnelle. La menace qui pèse aujourd’hui sur le sujet d’invention à l’Épreuve anticipée de français (EAF) met à mal « l’appropriation personnelle des savoirs et la créativité » encore visées par les programmes, et s’appréhende comme à contrecourant de l’émergence récente de l’écriture créative dans les cursus universitaires français.