
Langue française n° 167 (3/2010)
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Arrivée avec la colonisation en Afrique de l’Ouest, la langue française a été aussitôt marquée du sceau de la « mission civilisatrice » promue par la France. Ancrée dans un régime discursif essentialiste, cette tendance à faire du français le centre de valeurs, s’est largement imposée dans les imaginaires des nouvelles élites africaines. Au moment des Indépendances, la francophonie a pu ainsi cristalliser les aspirations d’une bonne partie de l’intelligentsia africaine. Si la critique de la francophonie, en tant que symbole de l’assujettissement des peuples, est née dans les années soixante-dix, le branchement actuel de ce type de discours sur les courants postcolonialistes vient à l’appui de positions culturalistes et identitaires. Cet article montre que cette position, au lieu de prédisposer à la naissance d’un nouveau paradigme discursif, résulte d’un retournement des discours épilinguistiques essentialistes européens.
Since French language arrived in West Africa with colonization, it was immediately tied to the “mission civilisatrice” promoted by France. Inscribed within an essentialist discursive regime, this tendency to make French the centre of values has imposed itself into the imaginaries of the new African elites. At the moment of independence, Francophonie crystallized the aspirations of parts of the African intelligentsia. If the critique against French as the symbols of subjugation has developed in the seventies, it has been recently coalesced into postcolonial discourses, imposing culturalist and identitarian positions. Using the example of Mali, this article demonstrates that instead of creating a new discursive paradigm, this position testifies the continuation of essentialising epilinguistic European discourses. In both cases, the intention is to impute imagined values to languages, to grant them qualities in order to categorize them.