
Langue française n° 167 (3/2010)
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Le propos de l’article est de revenir sur la représentation souvent véhiculée selon laquelle le français a été la langue véhiculaire dominante dans l’Europe des Lumières. Cette représentation, qui a pu parfois nourrir en France une gloire bien vaine, mérite d’être, sinon totalement corrigée, tout au moins fortement relativisée. On le fait en relisant les textes soumis au concours proposé en 1783 par l’Académie de Berlin, textes qui révèlent que les questions furent mises au concours dans un contexte de quasi « francophobie ». Un tour d’horizon rapide de la présence du français comme langue seconde dans différents pays d’Europe au XVIIIe siècle montre ensuite que l’on doit mettre l’accent sur la diversité des compétences et sur les variations diastratique et diatopique. Enfin, l’article propose une lecture différente de la place à accorder au français dans les diglossies, ou colinguismes ainsi créés en mettant en avant la possibilité d’utiliser pour le XVIIIe siècle la notion récente de multiculturalité.
The purpose of this paper is to revise the commonly received opinion that the French language was a dominant language in Europe during the Age of the Enlightenment. This view, which has been widely developed in France by historians and journalists needs to be, if not completely corrected, at least strongly qualified. A further look at the texts submitted to the 1783 Berlin Academy competition reveals that this it took place in a context of near-francophobia in Prussia. In a brief survey of the situation of the French language in various countries throughout Europe, we show that diastratic and diaphasic variation need to be examined. Finally, we suggest that, in contrast to the usual representation of vehicular languages as hegemonic, we can profitably apply to the 18th century the contemporary new notion of multiculturality.

