Romantisme n°184 (2/2019)
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En 1890, Maurice Denis appelait de ses vœux une décoration du livre « sans servitude du texte » consistant en « une broderie d’arabesques sur les pages, un accompagnement de lignes expressives ». L’ornementation linéaire qui investit le livre à la fin du siècle semble mettre en œuvre ce programme. Le livre devient alors un lieu où s’expérimentent de nouveaux nouages entre les arts et où s’inventent de nouveaux rapports entre lisible et visible. De l’amour de loin mis en abyme par l’ornementation de Mucha pour Ilsée, princesse de Tripoli à l’union libre du vers libre et de l’arabesque dans les éditions Deman en passant par le corps à corps de la reliure nancéienne, l’Art nouveau nous incite à filer la métaphore de l’hymen des arts effectué en mineur dans le livre considéré lui-même comme objet d’art.
In 1890, Maurice Denis expressed his hopes that books be decorated « with no servicing of the text », consisting in « arabesques embroidered upon the page, an expressive line accompaniment ». The linear ornamentation which takes over books at the end of the century seems to put this program in action. Books become a locus for the experimentation of new links between the arts and for the invention of new relationships between the visible and the readable. From love at a distance mis en abyme by Mucha’s ornamentation for Ilsée, princesse de Tripoli to the open marriage of free verse and arabesque in the editions produced by Deman through the physicality of Nancy bindings, Art nouveau invites us to extend the metaphor of the artistic hymen realised in the books in question seen as works of art.